Newsletter de supervision de la BCE de mai 2024 :
« Il est inacceptable de ne pas impliquer les experts immobiliers dans le processus de crédit immobilier»

Selon le dernier rapport public de la BCE, 40 % des emprunts immobiliers émis en Europe ne respectent pas les conditions fixées : tenir compte de la valeur du bien financé pour accorder ou non le prêt. S’il ne cite pas spécifiquement de pays, la France est implicitement visée.
UN FONCTIONNEMENT DU CRÉDIT IMMOBILIER NON-CONFORME AUX RECOMMANDATIONS DE LA BCE
En France, actuellement, le prêt immobilier est un prêt personnel : il est accordé en fonction de la solvabilité de l’emprunteur et n’accorde pas d’importance au bien en lui-même. De fait, pour les banques françaises, la maîtrise du risque est basée sur la capacité de l’emprunteur à rembourser, soit le taux d’effort, et non le rapport entre le montant de l’emprunt et la valeur du bien financé en tant que telle.
Or, depuis l’ordonnance du 1er juillet 2016, les banques françaises sont soumises, comme toutes les banques d’État de l’Union européenne, aux directives de la BCE permettant de garantir que les consommateurs bénéficient d’un niveau élevé de protection. Plus concrètement, si le crédit immobilier est supérieur à 75 000 € (non garanti par une hypothèque), la banque a l’obligation de mandater un expert pour évaluer le bien immobilier. Interne ou externe, celui-ci doit justifier d’un diplôme spécialisé ou d’une expérience de plus de 7 ans.
Cette pratique est aujourd’hui une exception pour les banques françaises, qui semblent ainsi dans le viseur du gendarme bancaire européen. En épinglant les 40 % de prêts émis entre 2021 et 2022 dont les biens n’ont pas été estimés par un expert, la BCE demande ainsi indirectement à la France de tenir compte de la valeur du bien immobilier en plus du taux d’effort.
UNE DOUBLE VÉRIFICATION DES RISQUES BIENTÔT OBLIGATOIRE
La vérification est pourtant déjà exigée depuis l’ordonnance de 2016. Avoir recours à un expert interne ou externe est même une consigne de l’Autorité bancaire européenne. De consigne, cela deviendra obligation dès l’entrée en vigueur du 3ème règlement européen sur les fonds propres, approuvé par le Conseil et le Parlement européen le 6 décembre dernier. Pour la BCE : un double objectif. Dans un premier temps, il s’agit de veiller à ce que les mêmes règles d’emprunt bancaire soient appliquées sur l’ensemble des marchés européens.
L’objectif principal ? Éviter les risques liés aux dettes. En effet, les prêts résidentiels représentent actuellement 3 700 milliards d’euros pour l’ensemble des 112 grandes banques supervisées directement par la BCE. Mais quels sont ces risques ?
Si un bien surévalué sans expertise indépendante et doit être récupéré par la banque en cas de difficultés de paiement des emprunteurs, l’impact sur son bilan sera négatif puisqu’elle devra passer des provisions dans ses comptes ;
En cas de défaut de remboursement, la banque pourrait saisir un bien à une valeur inférieure à sa créance ;
Lors d’une crise économique comme celle de 2008, les emprunteurs ne pourront pas rembourser leur prêt, entraînant une chute des prix immobiliers et une mise en UNE CONTESTATION DES BANQUES FRANCAISES.
EN RESUME
Selon le dernier rapport de la BCE, 40 % des crédits immobiliers européens ne respectent pas les directives bancaires européennes ;
La France semble particulièrement visée par ce rappel à l’ordre ;
En plus du taux, de vérifier la solvabilité de l’emprunteur, les banques doivent faire évaluer le bien par un expert indépendant pour assurer la cohérence de la somme empruntée.

Comments